Activas
Activate
par Nathalie Feisthauer
pour Hersip
C’est l’heure.
Elle se lève. Au-dessus des bois de Chiyoda, la brume du matin, encore, n’est pas. C’est le ciel bleu, la lueur bleue ; c’est le matin bleu d’Edo qui règne, avant la venue du soleil.
C’est l’heure. Les néons se sont éteints, l’iode et la mer s’éveillent.
C’est l’heure. Et elle court entre les rues quadrillées de gratte-ciels.
Elle court entre les silhouettes effacées du matin ; elle court, entre les ombres et les pins, entre les arbres en feuilles et les fleurs écrasées des jardins. Prestement, elle s’échappe, elle évade aux cris de la nuit, aux clameurs d’un jour pesant. Elle court au rythme de son cœur, comme un tambour, battant ; au rythme du taiko des dieux auxquels elle s’offre comme l’encens.
C’est l’heure. Et elle ne reviendra pas.
C’est le lourd chemin de l’inconnu qu’elle emprunte à pleins poumons. C’est le vertige qui l’obsède qu’elle recherche en courant. Tandis qu’elle s’efface aux monolithiques silhouettes de la ville, tandis qu’elle s’abandonne au silence du bois impérial, c’est sa peau, c’est son être, c’est son reflet anciens qu’elle délaisse. Elle paraît se réfugier dans le passé, c’est pourtant le futur qu’elle embrasse.
Le futur d’un jour, d’un être, d’un œil, d’un vivre nouveaux. Hier au soir, à la lueur multicolore des néons de Shinjuku alors qu’elle retirait à l’eau pure la vanité de ses fards, elle a croisé les yeux épuisés d’une vie aliénée. Dans le miroir, au clair-obscur des aurores orientales, elle vit, nue à nue avec son reflet, la nudité d’un être décollé – de lui-même.
Comme la pluie ont coulé ses larmes. Comme la pluie elles ont inondé ses mémoires. Au creux de la nuit, au creux du silence peuplé des klaxons tokyoïtes ; sur le sol de béton clair, contre la vitre de verre froid ; elle pleura les larmes chaudes de l’enfant qu’elle avait oubliée, reléguée au fond d’une armoire à rêves désenchantés. Elle pleura, se leva, armée de ciseaux elle se coupa – les cheveux.
La petite fille ne rêvait pas d’être une princesse. Elle rêvait d’envols, d’horizons décharnés, d’infini, d’illimité. Elle rêvait de courses, de mouvement, de danser libérée des regards et des carcans. Elle rêvait d’être seule et d’avancer sans souffrir le poids du jugement – de ses parents.
Elle laissa au sol, avec ses mèches, les restes d’un rêve qui n’était pas le sien.
C’était l’heure. Elle ne comptait pas la manquer.
Dans le bois, dans le silence froid de Chiyoda, sous l’œil des pagodes assoupies, elle laissa sa dernière obole aux divins. Les cèdres et les pins et les fleurs, les épines : tout se soulevait au souffle d’une brise marine, caressant l’eau des marais et les pierres.
Elle court, saisit un train en marche. Elle file jusqu’au sommet des montagnes blanches et bleues. Elle court, saisit un avion en vol. Elle file jusqu’au fond des steppes vertes et or. Elle court, saisit un ami en route. Elle file jusqu’au creux des vals escarpés d’Iran, d’Irlande, du Bhoutan et d’Espagne. Loin des villes, des champs, des hommes – elle se confronte aux vents, aux marées, aux lunes, aux falaises et aux laves chantantes des hauteurs napolitaines.
Activate, c’est une femme osant être femme. Activate, c’est l’explosion des carcans et des cadres d’une société patriarcale. Activate, c’est le désir de nouveauté qui submerge le cœur blessé, lavé, renouvelé par ses larmes.
Sous la houlette de Nathalie Feisthauer, Activate découvre, sous un voile de pudeur poudrée, la pétillance poivrée d’une femme agrippant son destin des deux mains. Pudeur, car Activate est pudique encore. Elle est nouvelle, elle est fragile, elle est immaculée.
Activate, c’est son premier souffle, son premier regard sur son nouveau reflet. Activate, c’est le frisson qui transfigure la fébrilité. Cristallin et précieux comme l’aurore croquante qui caresse les toits de verre d’Edo, Activate est aussi charnel et chaleureux.
C’est un réconfort mais un appel à aller plus loin. C’est la source vivifiante d’un nouveau départ, c’est la halte désaltérante au milieu du chemin. C’est une explosion de sève, c’est un mirage d’épines résineuses collant aux pierres mates et foncées des jardins japonais.
Activate est à l’image du Japon, de cette nouvelle femme japonaise qui s’assume et se veut telle qu’elle est. Une femme en route, comme sa mère patrie. Une femme multiforme, comme sa mère patrie. Une femme au constant levant de sa vie – comme sa mère patrie.
Activate est enfin la délicate alliance de la rigueur japonaise regardant le futur, rêvant au lointain, arrimée au présent.
Activate - Hersip
EDP 50ml - 111€ environ.
Disponible à La Place à Paris et au Japon.
Pour plus d’informations, visitez leur site Web : www.hersip.com