La Révérence

Irrévérent - Histoires de Parfums

Irrévérent - Histoires de Parfums

Irrévérent



par Luca Maffei

pour Histoires de Parfums



Parler d’Irrévérent, c’est parler de tous ceux qui aiment que l’on parle d’eux. Parler d’Irrévérent, c’est parler de tous ceux qui font parler d’eux. C’est parler de ces hommes fiers à l’allure altière qui vont en flânant dans les allées des parcs. C’est parler de ces hommes à chapeau et pardessus de soie, donnant du Monseigneur à qui on ne le doit pas. Parler de ces êtres hors du temps, pour qui le temps s’est arrêté à l’heure où ils l’ont décidé.

 

Parler d’Irrévérent, c’est parler de ces hommes buvant champagne en plein théâtre, fumant cigare en pleine terrasse. C’est parler de ces hommes à la sprezzature tant assumée, de ceux qui savent si bien qu’ils peuvent se permettre de paraître benêts.

 

Parler d’Irrévérent, c’est parler de ceux qui embrassent les mains des princesses et claquent l’épaule des cardinaux-prêtres.

 

Parler d’Irrévérent, c’est jaser sur ceux-là qui se postent à la Messe comme au théâtre, qui répondent en latin aux monitions françaises, qui écrasent la moitié de leurs cigares roulés mains ; de ces êtres remarquables au langage acéré comme une lance qui passent leurs temps à jurer entre quelques morceaux choisis d’auteurs désuets.

 

Parler d’Irrévérent, c’est parler de ceux qui osent. Qui osent, en ville, porter des derbies et déboutonner leur veste croisée. De ceux qui osent arriver en retard aux galas, de ceux qui osent faire un fracas d’une pleine Messe. De ceux qui osent porter mouchoir pour pochette.

 

De ces dandies du vrai genre pour qui les conventions n’existent que pour être mieux brisées.

irrévérent 2.jpg

Irrévérent n’est pas un éloge de l’irrespect mais bien celui d’une liberté – elle se perd. Liberté d’être soi-même, liberté de déranger, d’occulter, d’interroger, de brusquer les us et coutumes et manières ; les carcans de sociétés mortifères. Irrévérent, c’est Œdipe frappant à la porte des Enfers. C’est Monroe chantant Joyeux Anniversaire.

 

Bâti sur un accord brutal d’oud et de lavande, Irrévérent détonne. Il fait imploser la conventuelle pyramide de rose et de patchouli – à l’âpre noirceur de l’aloès, il joint la verdeur camphrée de la lavande. Le résultat éclate. Il surprend. Bombe florale et fraîche sur fond de baume, la profondeur du styrax remonte et celle de la base boisée. L’accord est noir et gouleyant, il colle, et tentant.

 

Irrévérent est tout ce que l’on aime détester. On le regarde avec un sourire, il nous fascine, il nous irrite mais l’on ne peut que pardonner. Débarquant sans manières –parce qu’ils les a trop connues- il renverse d’un sourire toute hésitation ou barrière. Il combat les préjugés. La lavande et l’élémi annoncent un encens ; l’ambre et le styrax renversent la donne.

 

En constant mouvement, en constant changement, l’Irrévérent ne se laisse pas aisément apprivoiser. Il donne à voir des facettes radicalement contraires pour se mieux protéger. Tantôt il est prince et gueux tantôt. Il côtoie les cardinaux, les évêques et les princes de tous mondes ; le lendemain on le trouve au milieu dans un fast-food au plus lourd des bas-fonds.

 

Pour se mieux protéger.

 

Car Irrévérent, après son départ déconcertant, révèle toute la chaleur de son être. Sous des atours envahissants, il se découvre protecteur. Les baumes s’ambrent, les bois se sucrent, l’encens s’enrésine – l’Irrévérent donne à goûter un cœur de miel. On comprend qu’il est le parfum de ceux qui fuient une réalité morbide ; de ceux qui assument leur inadéquation et en font une force.

irrévérent 3.jpg

Irrévérent est le parfum de ceux qui sont et veulent être. De ceux qui voient la dilution du temps et des cœurs. De ceux qui refusent et se refusent à un monde tout de rigueur. Parfum des rêveurs et des êtres perspicaces, Irrévérent est pour tous ceux qui vivent dans un autre temps, fugace : dans le présent.

 

Le temps des circonlocutions est passé.

 

L’Irrévérent ne l’est que par son refus d’un siècle assoupi sur lui-même. C’est son absence de limites qui dérange, c’est sa liberté qui dérange, c’est sa frivolité qui dérange, c’est cette absolue adéquation entre l’être et l’acte, entre la parole et la pensée qui dérange, c’est l’honnêteté dans ce qu’elle a de plus tranchant et de plus vrai qui dérange.

 

L’Irrévérent est ce fol en Christ du monde moderne lui rappelant ses contradictions, ses schizophrénies – ses reniements aussi.

 

Car l’Irrévérent ne renie rien. Il est. Avec ses vices et ses vertus, ne cachant rien des premiers, taisant tout des secondes, il est. Au contrepoint de toutes ces vies atrabilaires, l’Irrévérent choque parce qu’il s’autorise tout. Il effraie parce qu’il n’a rien à perdre. Ce qu’on appelle oisiveté est chez lui détachement.

 

C’est le parfum des cœurs humbles qui préfèrent qu’on les croie orgueilleux car l’Irrévérent est enfin déférent en tout et pour tout. Ses traits d’esprits traduisent son respect – car l’Irrévérent n’a pas le temps pour la flatterie ni la moquerie. C’est un peu l’être sans origine arrivant après l’heure et filant à l’anglaise pour s’éviter les pompeuses salamalèques.

 

C’est l’artiste qui quitte la scène en secret et qui y monte sans prévenir.

irrévérent 4.jpg

 

Parce qu’il est fragile et que sous ses atours rocambolesques,

Derrière l’extravagance,

L’Irrévérent n’aime qu’à

Tirer sa révérence.


Irrévérent - Histoires de Parfums

EdP 120ml - 220€

Disponible dans le monde entier. Pour plus d’informations, visitez leur site Web : www.histoiresdeparfums.com